LE MAL DES ARDENTS: L'ERGOTISME, DES MILLIONS DE MORTS
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LE MAL DES ARDENTS: L'ERGOTISME, DES MILLIONS DE MORTS
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Epis parasités par Claviceps purpurea
Le mal des ardents: à partir du Xème siècle le mal des ardents, ou feu de Saint-Antoine, ou feu infernal, ou encore feu sacré, causa la mort de centaines de milliers de personnes et de nombreuses autres furent brulées ou exécutées sur la place publique car considérées “possédées” par le diable. Cette “peste des extrémités“, comme certains l’appelaient alors, était provoqué par un champignon du groupe des ascomycètes: l’ergot de seigle (claviceps purpurea), qui parasite le seigle, le froment et l’orge entre autre. Le genre claviceps regroupe une cinquantaine d’espèces qu’on peut trouver sur de nombreuses céréales. Mais ce n’est qu’en 1777 que l’origine de ce fléau fut découvert grâce aux travaux de l’Abbé Tessier. Avec la peste, le mal des ardents était un des grands fléaux du Moyen-Age.
De couleur noirâtre, l’ergot de seigle se présente sous la forme d’une excroissance, un sclérote, qui s’accroche aux épis de seigle. Il pousse principalement sur du seigle abimé par des Étés très humides. En Europe au Moyen-Age, quand le pain se faisait à base de seigle, des populations entières étaient intoxiquées par des grains parasités. Cette terrifiante maladie frappait surtout les pauvres en épargnant les riches, car ces derniers ne mangeaient ni seigle ni farine de piètre qualité. On croyait alors qu’il s’agissait d’une punition divine et les églises se remplirent et moult processions se déroulèrent. On priait Dieu et ses Saints, notamment Saint Antoine. La consommation de farines préparées avec des grains ergotés engendre l’ergotisme qui provoque des troubles hallucinatoires et des délires avec des convulsions qui ressemblent à des crises d’épilepsie. Dans les cas graves elle entraine une gangrène des extrémités, provoquée par une diminution ou un arrêt complet de l’irrigation sanguine. Les chroniqueurs de l’époque écrivirent que “les malades étaient dévorés par un feu intérieur qui se localisait aux pieds, aux mains, à la poitrine. Puis le corps se desséchait et devenait noir, les extrémités se détachaient et ils mouraient dans d’horribles souffrances”.
- Vers 850 premiers cas d’ergotisme en Alsace.
- 994 Épidémie d’ergotisme à Limoges, 40000 morts, devant l’étendue du désastre une procession fut ordonnée. Le moine et chroniqueur Adémar de Chabannes (988-1034) nous relate les évènements: “Le dixième abbé, Geoffroy, gouverna pendant sept ans; il mourut le 5 des ides d’octobre (11 octobre 998). Sous son abbatiat, des plaies brûlantes couvrirent le corps des Aquitains, et plus de quarante mille hommes moururent de cette épidémie. Pour cette raison, l’abbé Geoffroy et les évêques d’Aquitaine assemblés à Limoges élevèrent le corps de l’apôtre (saint Martial premier évêque de Limoges) et le transportèrent au Mont-Jovis; de là ils le rapportèrent à son tombeau la veille des nones de décembre et la peste de feu cessa”.
C’est cet événement que commémorent aujourd’hui encore, tous les 7 ans, les Ostensions Limousines célébrées au Printemps.
- 1090 à Tournai en Belgique une “peste” se déclare, il s’agit certainement d’une épidémie d’ergotisme qui sévit également en Flandre et dans le Brabant. L’évêque Radbod propose au peuple de revêtir l’habit de pénitent, de jeûner un vendredi et de prier Notre Dame. Une procession est constituée dans laquelle les fidèles seront accompagnés des reliques de leurs saints. La supplication est entendue et le fléau cesse. Cette procession se perpétue encore annuellement de nos jours.
- 1129 à Paris sous le règne de Louis VI le Gros une épidémie d’ergotisme fit 14000 victimes. On fit appel à sainte Geneviève (422- 502), qui déjà sauva la ville à maintes reprises, d’Attila entre autre, et on organisa une procession solennelle. Au cours de cette dernière tous les malades qui s’étaient approchés de la châsse contenant les reliques de la sainte patronne de Paris furent guéris, à l’exception de 3 seulement qui avaient probablement manqué de foi ou de confiance en Dieu. L’évêque Etienne fit compter les malades, une centaine furent guéris. En souvenir de ce “Miracle des Ardents”, l’église Sainte-Genevieve-la-Petite devint Sainte-Genevieve-des-Ardents. Elle fut détruite en 1748 (source: le Bréviaire de Paris).
Gabriel-François Doyen - Le Miracle des Ardents Eglise St.Roch Paris
-1692: Les sorcières de Salem: http://mycologia34.canalblog.com/archives/2009/06/28/14229763.html
- 1722 Le tsar de Russie Pierre le Grand vit son armée décimé par l’ergotisme sur les bords de la Volga, alors qu’il allait guerroyer contre l’Empire turc.
- 1926 Dernière grande épidémie en U.R.S.S.
- 1951 Ergotisme en France: Affaire du pain maudit de Pont St.Esprit http://mycologia34.canalblog.com/archives/le_pain_maudit_de_pont_saint_esprit/index.html
Des recherches sur l’ergot de seigle débutèrent vers le début du XXème siècle, dans les années trente on établit la structure chimique des principaux alcaloïdes. C’est en travaillant sur des dérivés d’intérêt médical que le chimiste suisse A. Hofmann invente (malheureusement) en 1938 un dérivé synthétique le L.S.D 25. Il n’en découvrira cependant les effets hallucinatoires que le 16 Avril 1943 en avalant accidentellement une faible dose de produit.
Albert Hofmann (1906-2008) le père du LSD
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